750 grammes
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Crazy Yellow

18 août 2010

Jurassic Party, épisode 5 : Dites 33 chez le Dr Gahier...

Résumé des épisodes précédents: A peine remise des ses aventures dans les vignes et la cave du domaine Macle et de sa soirée aux Jardins, la Jurassic Party sévit désormais à Montigny. Après une matinée avec Jacques Puffeney,  la fine équipe reprend des forces au Grapiot à Pupillin, puis retour sur zone pour une "petite" visite chez Michel Gahier. On avait prévu l'après midi, on aurait pu y passer la journée. Parce qu'il est terrible, le Michel... Emporté par sa passion et sa générosité, il nous entraîne dans un véritable marathon: pas moins de 33 vins dégustés, et encore, en fin de journée, il a fallu s'arracher fissa parce que les vieux clavelins nous attendaient (on verra ça dans l'épisode 6), alors que Michel avait encore quelques trucs à nous faire goûter... 33 vins, faut s'accrocher, mais là en l'occurrence, c'était que du bonheur. Malheureusement vous n'aurez aucune image de cette dégustation-fleuve, pas un des participants, trop absorbés par les propos de notre hôte et les verres qui se succédaient à cadence soutenue, n'a eu le temps ou la présence d'esprit de prendre la moindre petite photo.

gahierJ'ai juste récupéré sur le net cette image de l'entrée du domaine, c'est pour que vous puissiez le trouver facilement si jamais vous êtes perdus sur la place de l'église à Montigny!

Ploussard 2008: robe claire, limpide, légère réduction, fruit rouge, groseille, poivre.

Trousseau Grands Vergers 2008 (sur fût): Malo terminée en septembre, pas de soutirage depuis la vendange. Le nez est encore très animal, mais le fruit est là. Beau vin avec de jolis tannins.

Trousseau Grands Vergers 2009 (sur fût): Un renard plus léger, beaucoup de matière, de la rondeur, du tannin. Plus de potentiel que 2008.

Trousseau les Messagelins 2009 (sur fût): Vignes de 40 ans. Très peu de réduction, du fruit, et plus de minéralité que sur les Grands Vergers. Très structuré, avec des tannins encore durs. Une touche poivrée au nez. A attendre, me dis-je. Un vin qui n'est pourtant pas taillé pour la garde selon Michel, qui donne son avis sur 2009: bien, mais pas une grande année, car les raisins manquaient d'acidité.

Trousseau le Clouzeau 2009 (sur fût): Un style plus léger, avec un nez ouvert sur le fruit, une bouche fruitée et gourmande et une finale discrètement épicée. Une parcelle située au bas du coteau des Grands Vergers, plantée il y a 25 ans. Michel estime qu'il commence à être suffisamment bon pour mériter une vinification parcellaire.

Trousseau Bérangers 2009 (sur fût): "Ca, c'est fait à l'ancienne" nous prévient-il... Cette petite parcelle de Bérangers est entrée récemment dans le giron du domaine. Durant ces deux dernières années, elle a été "désintoxiquée", le rendement passant de 100 à 28 hl/ha. Cuvaison semi égrappée, élevage en pièces de 30 ans. Un trousseau coloré, une belle présence, une pointe de minéralité, jolie finale épicée. Ce 2009 ne sortira pas sous l'étiquette Bérangers, car Michel trouve qu'il n'exprime pas encore vraiment la finesse de son terroir. "On verra en 2010"... En attendant, la désintox se poursuit. A noter qu'il s'agit du même lieu-dit que les Bérangères de Jacques Puffeney, dans les années 80 le Puff les vendait d'ailleurs sous le nom de Bérangers, j'ignore pourquoi il a féminisé par la suite cette dénomination.

Trousseau Grands Vergers 2005: Je retrouve ce vin déjà commenté ici. Très beau nez avec du fruit et et une première trace d'évolution à peine marquée, une pointe de volatile, la cerise, et un petit côté fumé. Une belle matière, du volume, et des tannins fins et serrés. On sent la maturité de la vendange. De garde.

Trousseau Grands Vergers 2000: Le retour du renard, avec des arômes giboyeux, une attaque souple en bouche, avec une structure acide et tannique qui laisse du potentiel. Les tannins sont fins et la finale présente une petite amertume agréable. Moins de volume que 2005, après dissipation assez rapide du renard, le vin est encore bien sur le fruit pour son âge.

Trousseau Grands Vergers 1999: Un nez fondu, harmonieux, ca pinote, avec des notes tertiaires encore discrètes, un peu de réglisse. les fruits rouges cuits, confiturés. Beaucoup de présence, un vin dense avec de la mâche et un bel équilibre et de la longueur. Très beau trousseau de garde qui commence à entrer dans sa phase d'évolution mais qui laisse pourtant une impression de jeunesse, et conserve beaucoup de potentiel, car l'acidité est présente. (15mg de SO2 à la vendange, 15 mg à la mise).

Trousseau Grands Vergers 2007: Un nez épicé, poivré, de la volatile,  trop à mon goût. Poivré également en bouche, et cerise. Doit encore s'ouvrir.

Chardonnay les Crêts 2009: (sur fût): Nez un peu citronné,, une pointe de levure, la bouche est arrondie, avec une sensation de sucre, fruits jaunes, mirabelle. Finale saline avec une acidité fine. Terroir de marnes rouges.

Chardonnay les Folasses 2009 (sur fût):  Malo en cours. Plus d'acidité, avec une finale amère. un vin plus sur la minéralité. Terroir mixte de marnes et graviers.

Chardonnay la Fauquette 2009 (sur fût): Vin qui reste pour l'instant ouillé pendant qu'il fait sa malo. La prise de voile viendra plus tard. On sent du potentiel: densité, concentration, notes de poire, minéralité. Encore un peu de sucre (3g/l). Parcelle de melon de 45 ans sur marnes grises.

Chardonnay 2006: Assemblage de plusieurs parcelles. Nez flatteur, riche. Miellé.

Chardonnay 2006 Clos Maire: Un vin "technique" nous dit Michel, autrement dit, un vin réalisé selon les préceptes de l'oenologie contemporaine, et donc pas représentatif de la démarche du domaine. J'avoue pourtant avoir apprécié; nez fruité, sur les fruits jaunes, la pêche, un fond de minéralité. Bouche équilibrée, avec une acidité qui tient l'ensemble.

Chardonnay 2005: Assemblage de plusieurs parcelles. nez fin, discret, un peu épicé, assez floral, avec une note de cire, de la minéralité, presque une pointe oxydative. Belle finale fruitée avec un retour d'acidité.

Trousseau 1988 vinifié en blanc: L'OVNI de l'après midi... De la réduction au nez, qui disparait au profit de notes de poire, avec une pointe anisée. Bouche équilibrée, très fraîche, encore beaucoup d'acidité, arôme de fruits jaunes, de miel. Incroyablement jeune pour un vin de plus de 20 ans. Très grande garde.

Chardonnay 1985 vendanges tardives: Le nez dénote la surmaturation et développe un registre oxydatif, sur la croûte de fromage. En bouche, un côté réglissé, demi sec, avec une petite acidité sympa, il me fait penser à un rancio de Rivesaltes blanc. Belle complexité et grande persistance. Vendangé le 15 novembre 1985.

Chardonnay les Crêts 2006:Un nez rond et très fruité, épicé, avec des touches fugaces de cannelle. Attaque en souplesse et joli fondu. Sympathique mais manque un peu de volume. A ne pas garder trop longtemps.

Chardonnay les Crêts 2007 (sur fûts): Encore fermé, avec de l'acidité et de la matière. Du potentiel, bonne longueur.

Chardonnay la Fauquette 2004: Le nez est ouvert mais discret, sur des notes fruitées et un contexte oxydatif peu marqué. Epicé et très rond.

Chardonnay la Fauquette 2005 (sur fût, sous voile): L'élevage sous voile apparaît de façon plus évidente, avec au nez la noisette, les épices, la pomme, une pointe de vernis. Gros volume, très belle longueur et une acidité fine et vive en finale. Encore bien jeune, mais grand potentiel de garde. A mettre en cave pour laisser tout cela s'harmoniser et avoir une très belle Fauquette dans quelques années.

Chardonnay la Fauquette 2002:Dans le même registre que 2005, mais fermé à double tour. Un millésime moins facile, Michel regrette de ne pas l'avoir carafé. Presque une sensation tannique en finale.

Chardonnay la Fauquette 1999: Un petit côté surmaturé au nez, une grande richesse: épices, rhum arrangé, noix de coco, banane. c'est très rond et ça se rapproche d'un savagnin. Grande longueur et beau retour aromatique en finale.A laisser vieillir encore un peu selon Michel.

Savagnin 2007: Le nez épicé, une pointe de noix sans excès, un petit côté végétal mais clairement oxydatif. En bouche c'est vif, belle acidité, un peu court.

Savagnin 2008 (sur fût, sous voile): Le côté oxydatif est moins marqué, le vin semble plus mur que 2007, avec du volume, de la matière et une grosse acidité.

Savagnin 2005 (sur fût, sous voile): Un savagnin destiné à partir en jaune, qui commence à peine à travailler sous voile. Il est en début de parcours, Michel prévoit de le laisser 10 ans en fût. Nez explosif, un peu piquant, raisin de corinthe, noix. Fermé, vif et raide en bouche. beau nez dans le verre vide.

Vin jaune 2002: Déjà ouvert au nez, sur les épices, le raisin sec, mais encore fermé en bouche. Belle pureté, complexité, grande longueur, avec une finale aromatique. L'alcool doit encore se fondre. Prometteur.

Vin jaune 2000: Nez complexe et harmonieux sur la croûte de comté, les fruits secs. déjà bien agréable à boire. une sensation presque tannique.

Vin jaune 1999: On est presque sur des notes d'agrume pour ce jaune en souplesse, déjà fondu, avec une belle amertume en finale. Au nez un côté vanillé, les épices, la noisette.

Les Amoureuses 2005, vin de table: Le vin de paille du domaine, 100% chardonnay, 12°5, ce qui lui ôte le bénéfice de l'appelation. On est sur le raisin sec, le pruneau, les fruits un peu blets. Beau paille, d'une redoutable buvabilité, bien équilibre, même si le sucre domine et l'acidité est moins perceptible que pour le 2003. (Eh oui...) Fin de bouche très suave.

Liqueur d'expédition des crémants: Michel élabore lui-même sa petite potion magique à crémants, sorte de paille hyper concentré. C'est extrêmement sucré, avec des notes inattendues de muscat, de rose et de litchi.

Crémant du Jura: Ouvert par Michel dans l'enthousiasme de cette fin de dégustation mais malheureusement pas assez frais pour qu'on puisse l'apprécier pleinement.

Difficile lorsqu'on n'est pas entraîné à cet exercice de rester concentré tout au long d'une dégustation aussi copieuse. Une certaine saturation s'est fait sentir dans la série des chardonnay, je suis donc peut-être passé à côté de certains d'entre eux. 33 vins, ça permet déjà d'avoir une vue d'ensemble de ce que fait un vigneron... Belle verticale de Grands Vergers, avec mention pour 2005 et 1999, et la confirmation du beau potentiel de garde de ce terroir dans les bons millésimes. Une belle occasion de passer en revue les Fauquette également, 1999 est superbe, et je si j'étais vous, j'encaverai 2005. Du côté des savagnins et des jaunes, j'aime beaucoup le style Gahier, ce sont généralement des vins amples, voluptueux, épicés, déjà agréables à boire dans leur jeunesse avec néanmoins un bon potentiel de garde.

Michel Gahier va arrêter de faire du trousseau générique, d'où l'apparition aux côtés des Grands Vergers d'autres cuvées parcellaires: Clouzeau, Messagelins, et à terme, Bérangers. Le Clouzeau m'a bien plu, dans un style plus en légèreté que les GV.La gamme s'élargit aussi en chardonnay avec les Folasses. A noter, au rayon changement, la disparition programmée de l'étiquette au viaduc, l'habillage est en cours de rénovation. Un grand merci à Michel pour son formidable accueil, et pour les collectors débouchés pour l'occasion, le trousseau blanc 88 et le chardonnay VT 85 sont de très belles bouteilles.

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2 juillet 2010

Jurassic Party épisode 4: chez Jacques Puffeney, le maître du temps...

Résumé des épisodes précédents: après avoir exploré, avec leurs pieds et leurs papilles, le terroir de Château Chalon, puis après une soirée éclectique mais néanmoins jurassienne dans les Jardins de St Vincent, les participants à la Jurassic Party entament la deuxième journée de leur périple...  Un samedi particulièrement rempli, riche en émotions et en rencontres avec de bons vignerons et de bonnes bouteilles. Recentrage pour cette deuxième journée dans le nord du vignoble, sur la commune de Montigny les Arsures, et démarrage dans la sérénité chez Jacques Puffeney.

DSCN9586On descend dans la crypte, au calme, au frais, pour un petit voyage hors du temps qui passe dehors, hors du temps qu'il fait, (on n'en a cure), dans cette cave intemporelle, où le maître des lieux laisse à ses vins tout leur temps... Des chardonnay et des poulsard qui s'affinent trois ans en foudres, un simple savagnin qui ressurgit en bouteille après 8 ans sous voile... et une pièce de jaune qui aura attendu une décennie avant de connaître le clavelin.

Petit voyage dans le temps: nous sommes en 1962. Le jeune Puffeney vinifie sa première récolte, 6 hectos de blanc, 6 hectos de rouge. Tout de suite sur le podium: médaille d'or en blanc, médaille d'argent en rouge au concours des vins du Jura. "Mon premier client, ca a été l'acteur Raymond Bussières, il tournait un film dans le coin, c'est André Jeunet qui me l'a envoyé, je lui ai vendu 6 bouteilles, ça a été le premier congé que j'ai fait". Aujourd'hui, en 2010, Jacques Puffeney veut prendre son temps. Ces quatre dernières années, le domaine est passé de 8 hectares à 5 hectares 60, dont 80 ares de chardonnay. "je veux me concentrer sur les choses que j'aime bien"... (les jaunes et certains rouges, ai-je cru comprendre entre les lignes).

DSCN9595Chez Jacques Puffeney, c'est plus le vin qui parle que le vigneron. Il sert un premier verre, laconique: "Ca, c'est le chardonnay 2005", et il attend.  Silence... On regarde, on hume, on goûte... La Jurassic Party n'en mène pas large, le temps suspends son vol, on entendrait une mouche voler, ou un voile de vin jaune se former. Je vous passe les clichés, genre le vieux sage de Montigny ou le pape du vin jaune, mais le bonhomme force le respect. Et ce n'est pas lui qui va nous noyer sous un flot de commentaires et de détails sur ce qu'on goûte. On ose quelques avis sur ce premier vin, on interroge, on questionne... la relation s'instaure ainsi, il faut aller le chercher, le Jacques Puffeney, mais le partage et la passion prennnent vite le pas sur le côté taiseux du personnage.

Chardonnay 2005: gros volume, nez arrondi, un peu anisé, sur des notes de fruits jaunes. bel équilibre en bouche. (3 ans d'élevage)

Chardonnay 2003: Malgré un nez assez vif, il reflète son millésime, avec un déficit d'acidité en bouche, une pointe d'alcool et une finale un peu chaude... Une vendange très précoce dans des conditions "extrêmes" pour le Jura. La parole à Jacques Puffeney: "Il faisait 24° la nuit, on ne rentrait le raisin que le matin, en utilisant de la neige carbonique pour rafraîchir la vendange, on a fait ce chardonnay qui titrait ses 14°5 naturels".

Chardonnay 2006: Un nez plutôt floral, une légère pointe végétale, et surtout une impression de moelleux. La bouche est celle d'un sec, puissante, avec une belle acidité. Jacques Puffeney: "En 2006, la chaleur humide et la pluie ont favorisé le développement de pourriture noble, d'où ce nez particulier. 1995 était du même tonneau".

Poulsard 2006: Léger renard, belle robe claire, une attaque sympa en bouche, les fruits rouges, des petits tannins qui accrochent, une note poivrée, à peine pas assez de fruit à mon goût. Jacques Puffeney: "Sur ce type de vin, j'évite le foulage qui oxyderait les baies avant la fermentation,  un élevage de 3 ans en foudre de 30 hl."

Trousseau Bérangères 2007: Beau nez de trousseau, avec ce relief que lui donnent des notes de fumée et de végétal. Une bouche sur la cerise, une matière assez légère, de petits tannins fins.

Poulsard 2003: Nez assez complexe, un peu kirsché, vin assez souple, un peu d'alcool en finale, mais de la matière et du relief mine de rien pour un 2003.

Pinot 2008 (goûté sur fût): Un jus de cerises noires en robe comme au nez. Coloré, épais pour un Jura. Marqué par le bois, tannique, doit encore se faire. L'attaque est assez douce, mais c'est raide pour l'instant côté tannins. A attendre, mais du potentiel.

Sacha 2007: 40% Sa(vagnin), 60% Cha(rdonnay). Un assemblage qui ne recherche pas à tout prix l'esprit oxydatif, comme souvent dans cette cuvée, l'osmose entre les deux cépages est très réussie. Beaucoup de fraîcheur et une fine acidité, sur la pomme. Sacha reste une valeur sûre en matière d'assemblage dit "traditionnel".

L1010208Naturé 2006: Savagnin ouillé. Un nez floral et sur les agrumes, une pointe épicée, avec de la vivacité. Très jolie et longue trame acide en bouche, avec des traces d'amertume, on finit sur des notes de fruits exotiques. Jacques Puffeney conseille de le boire maintenant, sur le fruit. On ne peut qu'approuver.

Savagnin 2004: mise récente après 5 ans sous voile. Une belle structure acide pour ce savagnin qui offre au nez des arômes complexes, parmi lesquels la croûte de comté, un côté levure de boulanger et une pointe miellée. Des notes minérales en finale.

Savagnin 2002: mise en bouteille la veille (28 mai) après quasiment 8 ans sous voile. Excellent savagnin dans un style opulent, épicé, tout en gardant une belle fraîcheur, très bel équilibre donc, et surtout une grande longueur. 8 ans de voile, ça pourrait être un jaune! Pas chez Puffeney, explication du maître: "un bon jaune, ça doit avoir entre 450 et 550 mg d'éthanal, pour celui-ci on doit être autour de 250 à 280 mg". Allez zou, rétrogradé en savagnin, mais des savagnins rétrogradés comme celui-là, je suis preneur. Voilà pour la partie scientifiquement mesurable, mais Jacques Puffeney poursuit sa démonstration, joignant le geste à la parole (je vais essayer de vous le faire avec des mots): "le jaune, ça vous tapisse jusqu'au fond (il montre son oesophage et son estomac), le savagnin, ça s'arrète là (il indique l'arrière du palais)".

Vin jaune 2002: Tout en finesse, pas du tout tapageur, mais très puissant et long. Il reste fermé pour l'instant. Jacques Puffeney: "on me dit souvent que je fais plus Château-Chalon qu'Arbois". C'est pas faux sur ce coup là.

Vin jaune 2001: Le nez est bien causant, sur la croûte de comté, les épices, c'est assez complexe. Attaque, souple, bouche ronde, et acidité bien intégrée, qui fait semblant de ne pas être là pour mieux ressurgir au meilleur moment en fin de bouche. C'est finement joué. Très beau.

Vin jaune 2000: plus monolithique sur la noix, le raisin de corinthe, un peu brûlant, l'alcool dépasse encore un peu trop...

Vin jaune 1999: Jacques Puffeney nous sort une nouvelle mise en bouteille de la veille (28 mai donc, pour ceux qui n'ont pas suivi) sur une pièce de 99, soit plus de 10 ans de voile. Un nez de fruits confits, de cire, très ouvert, tout en douceur. En bouche on a tout: la puissance, l'équilibre, le volume et une longueur d'anthologie, avec un petit quelques chose de salin en finale, c'est la la fois voluptueux et strict, facile et très complexe, rond et droit, et vraiment très long. Jacques Puffeney, modestement: " 1999 est un grand millésime, on a eu de belles choses, on aura des choses du même type en 2005 et 2009". Le vin en tout cas est très ouvert et accessible pour un jaune de ce calibre. Puffeney: "Souvent un vin jaune est ouvert juste après la mise en bouteille, ça ne dure pas longtemps, après, il se referme". Bien content d'avoir croisé ce 99 au bon moment.

Vin jaune 1997: On revient sur un registre plus sévère, avec des notes de racines, de gentianes et d'épices. Ca reste assez rond en bouche, très profond, mais nettement moins accessible que le 99.

Le temps est passé  vite, et nous ressortons au grand jour après deux heures et demi d'une très belle dégustation. J'en retiens 3 vins que j'ai particulièrement aimé ce jour là, le savagnin 2002, le vin jaune 2001 et le vin jaune 1999, et le souvenir d'une rencontre très enrichissante avec Jacques Puffeney... Merci à lui pour le temps qu'il nous a consacré.

La Jurassic Party va se sustenter avant l'épisode 5, une dégustation-fleuve chez Michel Gahier.

23 juin 2010

Jurassic Party épisode 3: On se cultive aux Jardins

Résumé des épisodes précédents: après avoir vécu des aventures palpitantes à Château Chalon, ascension du rocher et descente de cave, les participants à la Jurassic Party, exténués, se font hélitreuiller jusqu'à Arbois pour une session nocturne aux Jardins de St Vincent, le repaire de Stéphane Planche. Pour cette nouvelle étape de notre périple, l'idée du jardinier-sommelier-caviste était de nous faire découvrir quelques bouteilles sortant du parcours balisé que nous nous étions fixé pour le week-end. Les vins ont été dégustés à l'aveugle.

P1000099Un vin rouge très friand, très frais, très rond, avec une belle couleur pétante, presque fluo. Ce trousseau Le Ginglet 2007 de Philippe Bornard est très réussi, dans un registre croquant et gourmand. Très bon à boire maintenant, une sympathique bouteille pour les journées estivales qui approchent, espérons-le, à grand pas.

Une belle robe profonde et brillante, le nez est assez discret de prime abord, avec des notes lactiques. En bouche, une pointe de gaz , et des tannins qui accrochent un peu trop... Le ploussard la Chamade 2005 de Philippe Bornard est un peu difficile en l'état, mais présente un beau potentiel, à revoir dans quelques années.

P1000101Le trousseau Garde Corps 2005 du même Bornard a un nez fruité et fumé... Une attaque souple, un bel équilibre et un toucher de bouche très agréable. J'aime beaucoup, très beau trousseau avec là aussi un grand potentiel de garde.

On passe au blanc: un nez très parfumé de pâte d'amande, une impression sucrée... La bouche est pourtant très tendue, fraîche avec des notes végétales et une sacrée acidité en finale... Un melon de Pupillin: le chardonnay 2007 d'Emmanuel Houillon, issu du terroir de Viandrix.

Le cinquième vin présente un nez un peu piquant, un poil oxydatif, du citron, de la poire. Beaucoup de matière en bouche, c'est concentré et long, sur la peau de raisin, la pomme un peu oxydée, mais brûlant en finale. Ce savagnin 2005 la Combe de Jean Marc Brignot, malgré son caractère sec, contient un quart à un tiers de raisin touchés par le botrytis, ramassés début novembre sur le Curoulet. Lors de la fermentation alcoolique qui a duré 2 ans, un voile s'est formé. Le résultat est assez étonnant, je ne suis pas convaincu en l'état, à cause de la finale alcooleuse et d'une certaine lourdeur, mais ça peut bien évoluer.

DSCN9578Une belle couleur dorée, un nez entêtant de fruit, la mandarine blette, du grillé, du champignon, un nez rond et complexe... la bouche est très aromatique, élégante, avec beaucoup de volume, de beaux amers et une belle acidité, une finale un peu saline. C'est long et classieux. Ce chardonnay St Paul 1989 de Camille Loye, encore jeune, est ma bouteille préférée de la soirée...

Un nez tout en finesse, une bouche bien équilibrée, un oxydatif bien maîtrisé. C'est fin, épicé, un peu minéral, assez vif et frais mais avec tout de même de la rondeur. Joli vin jaune Côtes du Jura 1998 de Philippe Butin, élevé en cave fraîche.

Un OVNI pirate pour finir: Foxy Lady 2008 de la Grange aux Belles, AOC Coteaux de l'Aubance, un chenin sous voile. "Hommage à Jimi Hendriix et Francis Poirel" nous précise l'étiquette. Un nez surmûri, un petit côté médicinal, une pointe d'oxydatif et un peu trop de sucre pour moi.

DSCN9581Pas de note sur le Vin de Jardin, un VDP de la Grange aux Belles, un rouge sympa, digeste et sans prétention qui a bien tenu son rôle aux côtés du plateau de charcutailles et de fromage qui n'a pas fait un pli lors du mâchon final.

Merci à Stéphane pour son accueil chaleureux, ses commentaires éclairés et l'ambiance amicale qu'il sait créer dans son repaire arboisien.

Lors de notre transfert sanitaire vers le gîte de Villette les Arbois où nous prendrons un repos bien mérité, nos esprits à peine embrumés s'égarent déjà vers Montigny les Arsures, haut lieu de nos exploits du lendemain... Montigny les Arsures où l'on fait du bon trousseau, mais pas que... La Jurassic Party continue dans l'épisode quatre...

20 juin 2010

Jurassic Party épisode 2: Après l'effort, le réconfort au domaine Macle

Résumé de l'épisode précédent: Après avoir descendu, puis gravi les pentes du Puits St Pierre en compagnie de Laurent Macle, les participants à la Jurassic Party rejoignent le caveau de dégustation pour une revue de détail de la gamme du domaine Macle.

L1010192En fait de Château Chalon, et sur les supplications assoiffées de certains, c'est par un bon coup de Château...Lapompe que nous débutons la session. Mais pour finir de se désaltérer, rien de tel qu'un Crémant. le 2007 de la maison, pur chardonnay,  une bulle fine, de l'équilibre, la pomme, un chouia de poire. Il tient tout à fait son rôle: désoiffer tout en caressant le gosier.

Côtes du Jura chardonnay ouillé 2008: le vin a passé un an en fût. Un nez flatteur, de la minéralité, du fruit jaune, un chardonnay original avec une finale presque saline... J'aime beaucoup ce vin qui a beaucoup de caractère, le contraire d'un chardonnay passe-partout. Pas de soufre à la mise en bouteille, 2g/hl à la vinification.

Côtes du Jura chardonnay ouillé 2007: 6 mois de fût pour cette cuvée, qui présente des la fraîcheur mais aussi des notes beurrées, de pomme verte, une belle finale sur l'acidité et l'amertume. On est un peu plus proche qu'avec 2008 du blanc traditionnel du domaine, avec une tonalité plus jurassienne.

Côtes du Jura savagnin ouillé 2007: eh oui, même chez Macle on se met à ouiller le savagnin maintenant! (du moins une petite partie du savagnin, le domaine reste quand même l'un des temples de l'oxydatif!)  Un collector, pas commercialisé pour l'instant, une seule pièce produite de ce vin. Robe pâle, des notes végétales, boisées, une petite note discrète de bouillon. Le côté vif du savagnin est un peu gommé par le bois. Il manque un peu de fraîcheur à mon goût.

DSCN9560Retour en terrain plus traditionnel avec le Côtes du Jura  tradition 2007, 85% de chardonnay et 15% de savagnin. Laurent Macle nous explique qu'il met une proportion moins importante de savagnin que ce qui se pratique généralement dans le vignoble, pour préserver le fruité et la rondeur du chardonnay, le savagnin apportant de la complexité et du potentiel de garde. Les 2 vins sont élevés séparément sous voile, et l'assemblage se fait généralement un an avant la mise. Un côté minéral, gentiane pour ce 2007 pour lequel mes notes sont très succintes, mais que j'ai aimé.

Le Côtes du Jura chardonnay sous voile 2006 a un nez très expressif et complexe, un peu croûte de fromage, un côté sauvage. Il est plus rond en bouche, avec moins d'acidité que le précédent, mais une grande finesse.

Le Côtes du Jura tradition 2006 paraît paradoxalement plus arrondi que le pur chardonnay. Un vin bien souple, avec du gras, et la trilogie des arômes classiques, pomme noix, une touche de curry... Inutile de l'attendre longuement,on peut déjà le boire sans arrière-pensée..

Le Château-Chalon 2003, celui de la canicule: beau nez complexe, presque arboisien, très typé vin jaune. Un Château-Chalon rond, puissant, mais sans lourdeur,  étonnement ouvert et prêt à boire à l'heure actuelle. Les raisins ont été vendangés début septembre. Pour ceux qui comme moi attendent au tournant des 6 ans et 3 mois les jaunes de ce millésime totalement atypique, celui de Macle est très réussi et sans faiblesse.

DSCN9562Château-Chalon 1988: Le premier nez s'exprime sur la réduction et un côté fromagé. Le vin est carafé , il s'ouvre alors sur les fruits confits, d'épices douces, et à peine de noix sèche. La bouche est souple et concentrée à la fois, elle laisse une sensation voluptueuse, avec un beau volume rond et une grande longueur. Très beau clavelin d'une grande année, avec encore un grand potentiel de garde...

Fin théorique de la dégustation avec le Macvin, jus de chardonnay 2006 et marc 2000, très fondu, ouvert, épicé. Mais nous en venons à discuter des rouges du domaine (non commercialisés), et Laurent nous fait goûter son poulsard 2009 et son trousseau 2009. Il fait un peu son modeste, ne se dit pas très satisfait du résultat,  mais le poulsard est fringant, gourmand, très agréable sur le fruit, et si le trousseau est encore un peu dur pour l'instant, il montre du potentiel. Ces vins ne sont pas destinés à être commercialisés, ils sont destinés à la consommation familiale et à celle des vendangeurs.

Avant de prendre congé, visite des caves, impressionnante vision de ces caves voûtées ou s'alignent les pièces dans lesquelles 6 millésimes de savagnin s'affinent tranquillement dans la fraîcheur et l'obscurité... Au passage, l'amateur de vieux jaunes contemple avec une lueur d'envie les piles de millésimes anciens... Sur une barrique, trois clavelins rappellent le passé de la maison et témoignent des générations précédentes DSCN9575qui ont oeuvré dans ces caves: Château Chalon 1937 d'Elie Macle, l'arrière grand père de Laurent, Château Chalon 1962 d'Auguste Macle, le grand père, et Château Chalon 1973 de Jean Macle.

Au sortir de cette dégustation, on peut dire que si la barre reste haut plaçée sur les classiques qui ont fait la réputation de la maison, un vent nouveau souffle sur le domaine Macle. L'assemblage sous voile "tradition" et le Château Chalon restent les deux piliers, mais il va falloir compter désormais aussi avec les chardonnay, avec ou sans voile, à suivre de près. Comme un signe pour marquer ce "coming-out", pour les nouvelles cuvées ouillées, le domaine abandonne son éternelle étiquette un peu austère et sans fioritures au profit d'un design plein de fraîcheur et de jeunesse...

Grand merci à Laurent Macle qui a consacré tout l'après midi à nous guider, à nous faire découvrir ses vins et à nous expliquer sa démarche, un accueil chaleureux et généreux qui a donné le ton de cette Jurassic Party. Le soir, on en a remis une couche aux Jardins de St Vincent, ce sera à suivre dans l'épisode trois.

14 juin 2010

Jurassic Party épisode 1: L'ascension du Puits St Pierre par la face sud...

La Jurassic Party donc... Je vous préviens, ça va être un feuilleton. J'avais écrit, et ça fait un petit moment déjà, "Bientôt sur vos écrans"... Il est vrai que la mise en ligne traîne un peu, je vous l'accorde, lecteurs impatients... Mais bon, c'est le printemps, et j'avoue et que j'ai un peu plus de mal ces temps-ci à passer mes moments de loisirs à taper sur un clavier d'ordinateur. Enfin ça y est, c'est parti. C'est donc à Château Chalon que commence cette Jurassic Party 2010... Et on n'attaque pas par le dernier de la classe: le domaine Macle himself nous accueille pour débuter notre périple. Laurent Macle nous attends dans la cour et nous laisse le choix pour le petit tour des vignes prévu: à pied ou en voiture... C'est le début de notre périple de trois jours, on est encore en pleine forme, on choisit la formule sportive... On suit le guide, et c'est parti pour la traversée du village direction le Puits St Pierre. DSCN9550Le domaine Macle possède une parcelle dans la partie supérieure de ce terroir réputé, petite combe au sud-est de l'éperon rocheux, que l'on peut admirer sur pas mal de photos touristiques de Château Chalon... En entamant la descente, un petit arrêt tout en haut à la vigne conservatoire, de création récente, ceinte d'un mur, où les cépages maudits (ceux qui ont été virés comme des malpropres lors de la création des différentes AOC) sont replantés. Cette vigne qui accueille une vingtaine de variétés est travaillée par l'ensemble des vignerons de la commune. Parmi les plants cités par Laurent Macle, un dont je n'avais jamais entendu parler et dont le nom m'intrigue: l'Inconnu de Salins. Tellement inconnu que dans sa bible des cépages jurassiens, Charles Rouget, pourtant salinois, n'en parle pas! Peut être une dénomination très locale? La question est à creuser.

A l'heure actuelle, l'AOC Château Chalon  rassemble 89 propriétaires sur 89 hectares, dont 65 plantés en savagnin peuvent prétendre à l'AOC. Le domaine Macle totalise 8 hectares de chardonnay, 3 hectares et demi de savagnin et 40 ares de poulsard et de trousseau réservés à la consommation familiale et à celle des vendangeurs. 5000 clavelins de Château-Chalon sont produits en moyenne chaque année au domaine.

La parcelle Macle au Puits St Pierre, c'est un hectare de savagnin, replanté en 1985 (6500 pieds/ha), une reconquète après plus de 30 ans de friches, sur l'emplacement de l'ancienne vigne des abbesses. Un lieu hautement symbolique donc de Château Chalon. Ici on est en plein dans la pente, et elle est raide. La vigne est plantée en terrasses, perpendiculairement à la pente, entre des talus enherbés, le travail est difficile et le rendement ridicule: trois fois moins que les 25 hectos/ha que le domaine obtient dans d'autres parcelles de savagnin. DSCN9545De plus nous sommes dans la partie supérieure, et donc plus fraîche, du lieu-dit, le raisin y mûrit plus doucement. L'exposition est excellente, quasiment plein sud, avec un effet four solaire produit par les rochers qui bordent cette petite cuvette. Une parcelle emblématique donc, mais qui rentre comme toutes les autres dans l'assemblage final du Château Chalon: Laurent Macle, comme son père Jean, se refuse à produire des cuvées parcellaires, car selon lui l'élevage oxydatif gomme à terme les terroirs. A noter que le domaine travaille également la parcelle Cartier attenante, située le long du rocher, côté gauche en regardant vers le haut.

Laurent Macle nous emmène un peu plus bas, où une parcelle récemment défoncée et replantée permet de bien observer les fameuses marnes grises (ou bleues)  feuilletées du lias, élément essentiel du terroir castel-chalonnais. Au bout de quelques années les marnes en surface s'oxydent et se dégradent au contact de l'air et n'ont plus du tout le même aspect. L1010187Nous voilà arrivés bien en bas, il est temps pour nous de remonter la pente, histoire de mériter la dégustation qui nous attends au caveau. Retour donc au domaine, non sans un un petit arrêt au belvédère sur le bord ouest du village qui nous permet d'admirer le vignoble côté Menétru, et de situer de visu quelques lieu-dits qui causent: Vigne aux Dames, Beaumont, et Gaillardon derrière sa butte.

Il est temps d'aller goûter... Une dégustation à suivre dans l'épisode deux.

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1 juin 2010

La Vigneraie: derrière la petite porte au fond du garage...

Certains ont l'insigne privilège d'être reçu au domaine de la Romanée-Conti, eh ben moi aussi je suis un privilégié: récemment j'ai été accueilli au domaine de la Vigneraie. Inutile de le chercher dans l'annuaire ou chez votre caviste, ce domaine n'existe pas "officiellement". Son vin n'est pas à vendre, et pourtant il est produit, depuis plus de 30 ans, par Gérard, vigneron amateur à Avanne, à côté de Besançon.

DSCN9538Une rencontre de hasard: l'autre jour, je suis allé voir le maire de Besançon planter les premiers pieds de la vigne municipale. Gérard était là . Il s'implique dans le projet, persuadé que le terroir du coin peut donner de belles choses, et ça, il le sait par expérience, puisque non loin de là, à Avanne, il cultive sa vigne, derrière sa maison, sur le coteau pentu de Tuffet, un terroir autrefois réputé, exposé au soleil bisontin du matin au soir... En s'installant là en 1974, Gérard a trouvé dans la friche quelques derniers témoins du passé, vieux ceps quasi centenaires de trousseau et d'enfariné. Et il a commencé patiemment à défricher et à replanter, au fil des ans, le domaine s'est agrandi par rachat de parcelles voisines. DSCN9519Aujourd'hui, la Vigneraie, c'est 20 ares de chardonnay, pinot noir et savagnin, des arbres fruitiers, des fleurs, un enclos avec des moutons, un petit paradis qui domine le Doubs... Gérard a même refilé le virus à son voisin, occupé lors de ma visite à passer le motoculteur dans la vigne qu'à son tour il a planté il y a quelques années...

Après la visite du clos, on redescend et on pousse la petite porte au fond du garage. Derrière, surprise: un minuscule chai, quelques mètres carrés seulement, où sont vinifiés bon an mal an les quelques centaines de litres de Clos de Tuffet, l'équipement est digne d'un professionnel... Mais le meilleur reste à venir. Car sous la cave de la maison, aussi patiemment qu'il a défriché et planté ses 20 ares, Gérard s'est creusé son royaume, à la pelle, à la pioche, au seau et à la brouette. C'est là qu'il élève ses vins et qu'il accueille les petits veinards comme moi... C'est tout petit, pas un centimètre carré de perdu entre les fûts où murissent les vins de l'année, les piles de bouteilles et une foultitude d'objets et de souvenirs qui font de ce lieu un petit temple bachique... Ce n'est pas la Romanée-Conti, mais croyez-moi, je n'en étais pas moins heureux d'être ce jour invité à la Vigneraie.

DSCN9528Place à la dégustation, pipette dans le tonneau et hop c'est parti:  chardonnay 2009, assemblage chardonnay-savagnin 2008, déjà on sent que ça tient sérieusement la route... On passe aux bouteille et là, coup de coeur. Le chardonnay 2008, 18 mois d'élevage, est beurré, des notes de chèvrefeuille, très élégant en bouche comme au nez, ample, soutenu par une belle acidité, complexe, avec de la présence en finale. On est sacrément loin de la piquette qu'on s'attendrait à trouver au fond du garage d'un viticulteur du dimanche, à l'aveugle on serait sans problème en Bourgogne. On remonte de 10 ans en arrière avec le chardonnay 1998 qui a joliment vieilli, brioché, un côté bonbon anglais,  pas fatigué pour un sou. Le savagnin 2008 est encore tendu, avec l'acidité de la rhubarbe, mais prometteur.

Retour à la pipette avec de beaux pinots noirs 2009 encore en élevage, (dans des barriques de Château Latour, excusez du peu),  fruités, souples, une première pièce de vin de goutte, très sur le fruit, une seconde de vin de presse avec plus de corps. Là aussi le vin d'Avanne n'a pas à rougir de la comparaison avec des vins bourguignons.

Les petits tonneaux à droite, on revient côté jurassien avec les macvins... Le marc est distillé à l'alambic municipal,  puis il  passe quelques mois en fût. Certes, la méthode n'est pas très orthodoxe et ferait bondir ces messieurs de l'INAO, (mais la vigne d'Avanne, ils n'en ont cure) : pour accélérer le vieillissement, Gérard sélectionne à l'odeur des morceaux de chêne fraîchement coupés récupérés chez un copain, et les ajoute dans le tonneau. DSCN9535Il assemble ensuite un tiers de ce marc à deux tiers de pur jus de savagnin... Ca donne un 2009  complexe, très long, porté par l'acidité du cépage, déjà fondu (merci le chêne), sans aucune brûlure d'alcool. J'aime beaucoup, mais l'apothéose vient derrière: une solera de macvin!  (une jeune solera, débutée en 2002). Tous les ans, Gérard complète le tonneau avec un peu du nouveau millésime. Le résultat: un macvin à se taper le cul par terre, épicé, vanille, poivre, rhum arrangé, gingembre,  palette exotique qui ne masque en rien le raisin... Très équilibré, du velours en bouche, une grande complexité et longueur. Re-coup de coeur pour les macvins.

Je ressors au grand jour un peu étourdi... "A Besançon, on peut faire d'aussi bons vins qu'en Bourgogne" m'avait dit Gérard lors de notre première rencontre... j'avais acquiescé par politesse. En fait, il suffisait de pousser la porte au fond du garage pour en être convaincu. Merci à Gérard et à son épouse pour leur accueil chaleureux et pour cette belle découverte.

1 juin 2010

Henri Maire vendu à un fond d'investissement luxembourgeois.

Henri Maire change de mains...

La société viticole jurassienne vient d'être reprise par le groupe Verdoso Industrie. Les actionnaires historiques,  les deux enfants d'Henri Maire et l'ex PDG de la société, ont cédé au groupe Verdoso 55,83 pour cent des actions de la société. Depuis deux ans, Henri Maire était fortement déficitaire, et Verdoso est un fond d'investissement luxembourgeois spécialisé dans les restructurations d'entreprises... Dans un communiqué, la société de production et de vente de vins la plus connue du Jura indique que cette prise de contrôle fait partie d'un plan d'action destinée à redresser la situation... Selon Marie Christine Tarby, directrice générale du groupe et fille du fondateur, Verdoso est intéressé par la vigne, entends pérenniser l'emploi et conforter la société. Henri Maire est propriétaire de 300 hectares de vignes dans le Jura, et emploie 130 personnes dans le département et quelques 300 commerciaux dans toute la France.

31 mai 2010

Bientôt sur vos écrans: Jurassic Party 2010

Jurassic Party 2010,  c'est quelques amateurs passionnés de vins du Jura qui se croisent régulièrement et virtuellement sur le forum LPV... Une idée lançée il y a quelques mois: se retrouver "pour de vrai" dans le vignoble... Un week-end de fin mai avec un peu de soleil, un peu de pluie, des vignerons très accueillants, de la bonne humeur, de bonnes choses à manger... DSCN9547102 vins dégustés (dont 97 vins du Jura)... Jurassic Party 2010, c'est prochainement sur les écrans de Crazy Yellow...

Parmi les épisodes à ne pas rater: "L'ascension du puits St Pierre par la face sud" avec Laurent Macle, "Un tour d'horizon aux Jardins", "Un matin dans la cave de Jacques Puffeney",  " Dites 33 à Montigny avec le Dr Gahier"... et "Comment boire des clavelins vieux avec du neuf"...  Mais avant de nous lancer dans ce feuilleton, nous ferons un petit détour au domaine de la Vigneraie... A tout bientôt...

25 mai 2010

Château Chalon 1982 Louis Florin: révision avant un week-end chargé

Château Chalon 1982, Louis Florin, Voiteur.

Il faut savoir se préparer aux grands rendez-vous... Nous sommes quelques uns à attendre avec impatience ce dernier week-end de mai, date calée depuis belle lurette pour un raout en Arbois entre quelques passionnés de la chose vinique jurassienne... Visites de domaines, rencontres, dégustations, millésimes jeunes et moins jeunes, vins jaunes, blancs ou rouges, on va avoir de quoi s'occuper... Vu qu'il est question, entre autres, de traîner autour du rocher castel-chalonnais et de remonter à la lumière du jour quelques vieux clavelins, je décide de réviser mes gammes avec ce Château-Chalon 82.

Une bouteille très bien conservée: cire, bouchon, étiquette sont en très bon état, le niveau est impec. Débouchage la veille, le bouchon sent bon la noix et le raisin de corinthe, le parfum DSCN9490du jaune libéré de sa geôle embaume la cuisine. Un petit fond de verre pour mettre le clavelin à l'épaule jusqu'au lendemain: nez sur la noix sèche,  un peu agressif, alcooleux, mais aussi en douceur: le raisin sec du bouchon, l'alcool qui tire sur le vieux marc... A la première gorgée d'un jaune, on s'attend souvent à un choc... Là, c'est fondu, suave, moins noix en bouche qu'au nez, l'acidité vient derrière, avec une finale assez chaude et l'amertume d'une suze. Les notes de vieux marc reviennent en rétro-olfaction, c'est long... Ca devrait être assez sympa. Vivement demain.

Le lendemain, sur un risotto aux morilles, le clavelin tient ses promesses: derrière un nez sans opulence, un tout petit peu brutal, mais le vin est rond, profond, droit, avec de beaux amers en finale et une acidité fine. Beaucoup de classe, on retrouve la noix, de la pomme verte, une note citronnée, les raisins secs, le marc. L'attaque est très agréable, il y a du volume, de la concentration, mais aussi une certaine rigueur minérale qui finit en longueur sur cette amertume que j'aime beaucoup, à la fois stricte et douce. Un beau Château Chalon, mais l'alcool vient amoindrir l'élégance. Un bel avant-goût en tout cas, pour patienter jusqu'à ce week-end qui s'annonce des plus prometteurs.

20 mai 2010

Clos des Equeugniers 2013, vin de Besançon...

Forcément, on ne l'a pas encore goûté, ce Clos des Equeugniers... Si Bacchus et Saint Vernier le protecteur des vignobles franc comtois le veulent bien,  2013 sera le premier millésime de ce cru, planté pas plus tard que cette semaine. On ne sait pas encore si le vin s'appellera ainsi, les Equeugniers, c'est le nom du lieu-dit, sis à Besançon, parcelles LO 114 et LO 115 au cadastre, d'ailleurs s'ils veulent faire style, ils n'auront qu'à l'appeller comme ça leur vin, LO 114 et LO 115 c'est assez tendance, ça devrait bien se vendre dans les bars à vin branchés...

Sauf que ce vin ne sera pas à vendre. Car après ses piscines municipales, sa police municipale, ses crèches municipales, ses jardins municipaux, ses vélos municipaux et plein d'autres choses tout aussi municipales, Besançon a décidé de se doter de sa vigne municipale. Un projet où se rencontrent pèle-mèle: un maire qui se souvient de la piquette produite par son tonton sur les coteaux bisontins dans les années cinquante, un employé DSCN9487recdes espaces verts féru de viticulture, un vigneron jurassien qui rêve de voir reverdir la vigne à Besançon, un retraité qui cultive son petit vignoble pour le plaisir, un pétillant pépiniériste haut saônois octogénaire et quelques autres encore.
Petit retour en arrière: en 1824, les collines autour de la ville sont couvertes de 1600 hectares de vigne. En 1161 déjà, un chroniqueur signalait la qualité des vins de la cité. Au 17e et 18e siècle, l'âge d'or de la viticulture bisontine, plusieurs milliers de journaliers et petits vignerons travaillaient pour quelques centaines de propriétaires... Il y avait des crus réputés: les Ragots, les Trois-Châtels, Tuffet... Bref, Besançon était une cité authentiquement viticole. Là-dessus sont arrivés les vins du midi, par voie fluviale puis par chemin de fer, une fiscalité croissante, le mildiou, le phylloxera... Les cartes postales du début du 20e siècle montrent encore des paysages de vignobles, mais en 1914 il ne restait que 158 hectares, et 4 hectares en 1963... Depuis longtemps la friche a repris ses droits, l'urbanisation a gagné du terrain, ne subsistent quelques rares parcelles cultivées pour une consommation familiale, et des traces: cabordes (cabanes en pierre sèche) écroulées ou parfois restaurés, murets de pierre sèche, ceps retournés à l'état sauvage.... Des noms de rues aussi: le Chemin sous les Vignes de Rognon par exemple, ou plusieurs chemins des échenoz de ceci ou de cela, les échenoz étant les petites terrasses autrefois aménagées dans les coteaux.

La vigne municipale donc: Pensée dans les règles de l'art, trente ares sur un coteau exposé sud-sud-est, à Port Douvot en bordure du Doubs, au soleil de 7h du matin à 7h du soir, un terroir argilo-calcaire bien drainant, DSCN94771800 pieds de chardonnay, pinot noir et trousseau. Une association pour le renouveau de la viticulture à Besançon s'est créée pour l'occasion, présidée par Gérard Tattu, un retraité qui cultive quelques ares pour son plaisir à Avanne, juste à côté. Et il y va franco: "Un vin de Besançon peut valoir bien des Bourgogne"... à vérifier sur pièce, mon petit doigt me dit que ça ne saurait tarder. La famille Guillaume, de Charcenne en Haute Saône, vignerons mais surtout pépiniéristes viticoles depuis 1895 (un catalogue de 160 cépages vendus aux viticulteurs dans le monde entier) a fourni les plants. Henri Guillaume, le patriarche, 87 ans, est venu scruter le terrain d'un oeil d'expert: "un sol à pinot noir, il va bien se plaire"... Géraud Fromont, vigneron au Domaine des Marnes Blanches à Cesancey, assurera le suivi,  lui aussi le sent bien, persuadé que le terroir des Equeugniers a un beau potentiel... Et la ville veut travailler à l'ancienne: travail au cheval comtois, piochage entre les pieds, pas de pesticides ni de produits de synthèse, du soufre, du cuivre et des tisanes de plante. Rendement prévu: moins de 40 hectos à l'hectare, soit 1200 litres de rouge ou de blanc qui agrémenteront à terme les vins d'honneur de la municipalité. Reste plus qu'à attendre 2013 pour les premières vendanges...

17 mai 2010

Grands Vergers 2005, Michel Gahier: joliment troussé...

Arbois Trousseau Grands Vergers 2005, Michel Gahier, Montigny les Arsures

Michel Gahier, c'est le genre de gars qui préfère s'occuper de ses vignes et de ses vins plutôt que de ramener sa fraise sur le web ou ailleurs pour se faire de la pub... D'ailleurs de la pub, je ne pense pas qu'il en ait besoin... Ca se sait de plus en plus qu'en sonnant à sa porte, tout près de l'église à Montigny, y'a moyen de dégotter des vins de plaisir à des prix raisonnables...
Montigny,  terre à trousseau, que dis-je, capitale mondiale du trousseau.. Et chez Michel Gahier, y 'en a du trousseau, et du bon... La cuvée de base, et les Grands Vergers, issus d'une parcelle de vieilles vignes près du viaduc (*) (celui qu'on voit sur les étiquettes)...

Je fais un peu de rangement dans ma cave et tombe sur mes Grands Vergers 2005... DSCN9448Difficile de résister à la tentation de goûter au dernier en date des grands millésimes jurassiens... La météo a été du côté des vignerons, printemps et été propices, et belle arrière-saison... La bouteille a passé le cap de sa prime jeunesse, or Michel Gahier fait souvent des trousseau qui sont bons tout jeunes, sur le fruit, mais qui ensuite ont tendance à se refermer pour se révéler à nouveau après quelques années de garde... Où peut-il bien en être ce 2005?  Plutôt en pleine forme, le bougre! La robe et le nez font  encore jeunes, un nez en fraîcheur, avec une pointe d'acidité volatile, pas suffisamment pour qu'elle soit désagréable, et des arômes de cerise et d'épices... Cerise et épices qu'on retrouve au palais, l'attaque a du peps, derrière le vin est bien équilibré, avec des petits tannins fins, le petit côté acidulé qui va bien et une rondeur finale qui donne presque l'impression d'avoir un chouia de sucre... Une petite chose toute en finesse me direz vous, mais en même temps c'est un trousseau avec du corps, des épaules, et un bel avenir devant lui... On sent que le raisin a été cueilli bien mûr, juste quand il fallait... Une manière de résoudre la quadrature du cercle: déjà bon aujourd'hui, avec encore beaucoup de fruit, à garder sans problème, et rendez vous dans dix ans pour d'autres sensations...

(*): voir le commentaire d'Olif ci dessous

13 mai 2010

Bons baisers de Pompei...

And the winners are... la Véro, l'Olif et le Mbvhq!  La semaine dernière fut effectivement consacrée à un stage intensif de dolce vita à la napolitaine, avec visite de Pompei, histoire de se fabriquer un alibi culturel entre deux trattorias...
La parcelle est plantée sur le site même de Pompei et se veut la reproduction de la vigne qui existait au même endroit, près de l'amphithéâtre, au moment de l'éruption en 79: 2080 pieds de Piedirosso et de Sciascinoso, cépages déjà connus dans le monde antique sous le nom de vitis oleagina et columbina purpurea, qui figurent d'ailleurs sur des fresques pompéiennes.

Cette vigne plantée en 1996 selon les indications des auteurs antiques, est exploitée par la maison Mastrobernardino, l'un des gros poids lourds vinicoles du coin, premier millésime produit en 2001. Pour en savoir plus, voir par ici (accrochez vous c'est du français de traducteur automatique). En tout cas ce tralala à base d'archéologie et de marketing leur permet de vendre la bouteille, sous l'étiquette Villa dei Misteri, à un prix astronomique. J'ai cherché par curiosité sur le net: le site le moins cher la propose à 150 francs suisses, soit une grosse centaine d'euros!

DSCN9274La vigne et le vin sont très présentes à Pompei qui fut un gros centre viticole... On s'accouderait volontiers au comptoir d'une taberna, où l'on voit encore les dolia maçonnées à même le comptoir, jarres qui contenait la cuvée du patron. Et la villa dei misteri, exploitation agricole et viticole un peu à l'extérieur de la ville, permet de découvrir, outre des fresques célèbres, la reconstitution de ce magnifique pressoir à levier, d'où le jus coulait par gravité à travers des rigoles directement dans des citernes souterraines pour y fermenter. C'était il y a presque 2000 ans, aujourd'hui on en est à réinventer cette simplicité de vinification...

Trois bonnes réponses sur  trois, il faut reconnaître que la devinette était plutôt fastoche: "à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire" (Corneille, Le Cid, acte 2, scène 2)... Mais vous faites moins les malins et la maligne sur la question subsidiaire... Ne faisons pas durer le suspense: L'une des sources les plus fécondes et les plus anciennes sur le vin et la viticulture est l'Histoire Naturelle de Pline l'Ancien. Il y mentionne notamment le vin de Séquanie, et la plupart des livres et sites sur le vignoble jurassien s'appuient sur cette citation (vers 70 ap. JC) pour affirmer que le vin du Jura est l'un des plus anciens de France (confondant très souvent au passage Pline l'Ancien et son neveu Pline le Jeune, autre auteur romain de best-sellers).  Et comment a-t-il fini, feu Pline l'Ancien? Il est décédé en 79 à Pompei, pour s'être approché un peu trop près du Vésuve en éruption. Le brave homme voulait observer le phénomène et venir en aide aux habitants, il mourut asphyxié.

Une bien belle histoire qui fait le lien, certes un peu capillotracté, entre le vignoble du Jura et Pompei... Mais le respect de la vérité historique m'oblige à préciser que c'est du total pipeau. Car Roger Dion, dans son irremplaçable Histoire de la Vigne et du Vin en France, estime dès 1959 que la citation de notre ami Pline n'est qu'une erreur de transcription, qu'il n'était pas question de la Séquanie, mais d'un lieudit du vignoble de Vienne, l'actuelle Côte Rôtie. Ce qu'on peut dire aujourd'hui, c'est que la culture de la vigne dans le Jura à l'époque romaine ou gallo-romaine n'est pas exclue, mais que rien dans l'état actuel de la recherche ne permet de la confirmer. L'histoire de Pline, bien qu'inexacte, est cependant trop belle pour ne pas figurer dans bon nombre de présentations du vignoble,  de plaquettes ou de sites de vignerons jurassiens. Pline ou pas Pline, Ancien ou Jeune, qu'importe si le vin est bon... Et voilà comment on revient dans le Jura en partant de Pompei...

11 mai 2010

Bons baisers de ...?

Ca n'a pas beaucoup bougé sur Crazy Yellow ces derniers temps, et pour cause: votre serviteur a pris quelques vacances bien méritées, loin d'internet. Alors, avant de reprendre le fil de mes jurasseries, une petite carte postale... Rien à voir avec le Jura, encore que...

Soyons joueurs: voici donc cette carte postale. le cachet de la poste est forcément côté verso, à vous donc de deviner où a été prise la photo. Indice: Ce vignoble est cultivé selon des techniques antiques, il s'agit d'une reconstitution, car le vignoble original n'a pas survécu (il aurait eu du mal) au terrible événement qui a fait que cet endroit est connu dans le monde entier et visité par des millions de touristes.

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Question subsidiaire: Nous ne somme pas dans le Jura, pourtant le lieu où se trouve cette vigne a effectivement un lien avec le vignoble jurassien... Quel est ce lien? (Là, c'est dur... si vous trouvez, chapeau!)

28 avril 2010

En Chalasse 2000, Alain Labet: on a bien fait de se réjouir...

Côtes du Jura Fleur de Marne En Chalasse 2000, Alain Labet, Rotalier

En ce moment à la maison, c'est la période idéale pour boire du vin blanc: ils sont directement à bonne température quand ils remontent de la cave, inutile de les rafraîchir ou de les laisser se réchauffer, un coup de tire-bouchon et zou, c'est parti. Ca permet de choisir au débotté, sans planifier à l'avance pour avoir une bouteille à bonne température... "Promis, on goûtera un de ces quatre du chardonnay de chez Labet" avais-je écrit ici. Crazy Yellow, le blog qui tient ses promesses!

"Et on se réjouit d'avance" disais-je aussi. A juste titre avec ce Chalasse 2000. DSCN9235La robe est brillante, le nez est fondu, harmonieux, la bouche à l'avenant, souple en attaque, avec un très bel équilibre jusqu'en finale, un vin accompli au bout de dix ans, puissant mais qui reste élégant, malgré une légère pointe de chaud pour terminer (13°, quand même). L'été 2000 a été plutôt marqué par la pluie que par le soleil, mais là on a vraiment l'impression d'un millésime solaire, on dirait un Bourgogne d'une année riche et opulente, voire même un chardonnay carrément sudiste, bien malin qui à l'aveugle irait chercher dans le sud...Revermont! Pas un poil d'oxydation qui nous mettrait sur la piste... On est sur des notes briochées, de fruits jaunes, avec une discrète pointe anisée.  Du gras, du volume, de l'opulence, mais sans molesse, l'équilibre est tenu jusqu'au bout.  Une bouteille à son apogée, c'est tellement bon maintenant qu'il n'y aurait rien à gagner à la laisser encore vieillir, d'autant que l'acidité se fait discrète. Un plaisir de boire ce vin dans sa voluptueuse maturité.

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25 avril 2010

Pierre Overnoy: les vaches ne lui disent pas merci...

"J'ai trait les vaches jusqu'à 40 ans, mais la vigne m'intéressait davantage"... C'est Pierre Overnoy qui parle, dans un long entretien * avec Martine Coutier, linguiste oenophile, auteure du passionnant Dictionnaire de la Langue du Vin (CNRS éditions, 2007). Pierre Overnoy, le vigneron de Pupillin, l'homme qui, un jour, est sorti du troupeau pour faire le vin à son idée...

A Martine Coutier, il raconte... Son enfance paysanne dans la petite exploitation de polyculture de ses parents... Comment en 1968 il décide de se consacrer exclusivement à la vigne... Sa rapide formation en oenologie à Beaune avec Max Léglise, "je pensais faire un meilleur vin avec ce que j'ai appris, aujourd'hui je me repens"... La remise en cause de sa manière de faire le vin: "au moment où on ouvrait le tonneau de mon père et de mon frère qui avaient continué de faire comme on avait toujours fait, je trouvais de bons arômes, une belle qualité d'arômes, et puis moi, dans les miens, hola, plus grand chose qui me plaisait, alors je me suis dit: mince, ce n'est pas la peine d'avoir appris si c'est pour faire ça"... Sa rencontre avec Jacques Néauport, qui lui fait connaître Jules Chauvet et Alain Chapel. Pierre_OvernoyLes bases de son travail, "typicité, pureté, harmonie et capacité du vin à vieillir"... Le choix de l'ouillage: "moi j'ai toujours ouillé le chardonnay (...) pour moi le chardonnay doit rester fin, élégant, absolument pas oxydé", les débuts du vin sans soufre, les premières expériences d'ouiillage de savagnin "ca a fait polémique, ouh là!  beaucoup de gens disaient : on va dénaturer le savagnin"...

Le vin pour Pierre Overnoy c'est d'abord le plaisir, "on doit se faire plaisir en buvant un coup", mais c'est aussi la rigueur "quand je fais des dégustations, je dis aux gens; on doit entendre une mouche voler"... Il parle, pêle-mêle, de la relativité et de la difficulté de l'exercice de dégustation, des importatrices japonaises qui débarquent à Pupillin, de la pénurie de bouteilles pendant la guerre, de l'importance de la relation vigneron-client, de ce qui fait pour lui un grand vin "il faut s'attacher à la qualité dans la longueur (...) je dis pour plaisanter: si tu mange de la merde, ce sera long en bouche"

Si Pierre Overnoy avait continué à traire les vaches, probablement aurait-il fait le meilleur lait à comté qui soit. Pour notre plus grand bonheur, il a fait du vin, et tracé un chemin sur lequel les viticulteurs sont de plus en plus nombreux à marcher. D'autres que lui se la seraient joué star, et nous assèneraient des leçons... Mais de cet entretien, c'est tout le contraire qui se dégage:  humanisme, modestie, simplicité, et tolérance aussi, à l'heure où la blogosphère est secouée de temps à autres des remous d'un pseudo débat sur le vin naturel qui  voit deux camps bien adossé sur leurs certitudes se regarder en chiens de faïence ...

*  Entretien de Martine Coutier avec Pierre Overnoy, vigneron... in Lettres Comtoises n°3 "Pain, vin, saveurs", décembre 2008, ISSN 1620-2635. A exiger chez votre libraire. S'il renacle, vous pouvez commander l'ouvrage auprès de l'Association du livre et des auteurs comtois, Centre Pierre Mendès-France, 3 rue Beauregard, 25 000 Besançon, en joignant un chèque de 12 euros à l'ordre de l'ALAC.

22 avril 2010

Le vin jaune à la radio

Une fois n'est pas coutume, je reprends cette info trouvée sur le forum La Passion du Vin... C'est l'ami Oliv, inlassable arpenteur du web vinicole, qui nous signale que l'excellente case documentaire de France Culture "Sur les Docks",  prenant prétexte de la Percée de Poligny,  propose un documentaire sur le vin jaune. Parmi les intervenants, le collectionneur François Audouze, Roger Gibey qui a étudié le jaune sous l'angle de la biochimie, l'oenologue de la Fruitière d'Arbois Nicolas Cottier, et les vignerons Bernard Badoz, Philippe Bornard et Pierre Overnoy.

A écouter le mardi 27 avril sur France Culture de 17h à 18h.

Merci Oliv!

16 avril 2010

Vidéo: Vendanges 1973

Je vous propose de regoûter au charme désuet des reportages de l'ORTF, sur le site de l'INA. Cette fois, il s'agit des vendanges 1973.

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Elaboration du vin de paille, descente dans la cave à jaune, le premier vigneron interviewé est très probablement (au vu des étiquettes des clavelins présentés), Pierre Peltier, de Ménétru le Vignoble.

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A l'époque, 250 vignerons à temps plein dans le Jura, et 500 paysans en polyculture cultivant de la vigne. Il est question de vendanges s'échelonnant entre le mois d'octobre et le 11 novembre. 1973 est considéré aujourd'hui comme un beau millésime.

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Dans ce reportage, Pierre Peltier en parle comme d'une année souple, de grande garde, grâce notamment à un titre d'alcool élevé: des rouges "très mûrs" à 11-12°, des blancs de 11°5 à 13, et des savagnins dont les vendanges sont prévues fin octobre entre 12°5 et 13°5... C'était avant le réchauffement climatique...

11 avril 2010

Ganevat 100% Rien que du Fruit: interdit aux cons?

100% Rien que du Fruit, Vin de Table de France, Jean-François Ganevat, Rotalier.

En quelques années, Jean-François Ganevat est devenu l'une des références dans le Jura et c'est amplement mérité. Ah, ses chardonnay Grands Teppes,  ses Chalasses vieilles vignes, son Crémant "Oh que c'est Bon"... C'est justement d'un crémant dont il est question cette fois, un vrai-faux crémant pas fini, sans les bulles, en fait un chardonnay destiné à être champagnisé, mais que le vigneron a trouvé très bon comme ça, il l'a donc laissé en l'état, et ça a donné ce "100% Rien que du Fruit". Bouteille un peu lookée vin naturel, cire noire du plus bel effet, 10°5 d'alcool, "Vin naturel vinifié comme autrefois, sans collage ni filtration" nous renseigne la contre-étiquette.

DSCN9040Boire ce vin, c'est, pour commencer, se prendre direct, sans préliminaires, une bonne claque dans les gencives: une vive acidité d'entrée de jeu, qui se prolonge sans mollir jusqu'en finale. C'est sûr, ça dessoiffe!  Notes de levure et de citron au nez, une légère pointe de gaz, c'est tendu et très acidulé. Un blanc de soif, plus propre à décaper les papilles avec le casse-croûte de charcutailles qu'à susciter une thèse de doctorat sur la complexité de l'expression du chardonnay dans les terroirs du sud-Revermont. Sympa. Mais raide quand même.

Alors, au final, il est bon ou pas? That's the question, et je tourne autour du vin sans arriver à trancher... Une gorgée: c'est plutôt bon, mais c'est quand même très acide... Nouvelle gorgée: c'est vrai que ca rigole pas dans le genre tranchant, mais c'est quand même bien bon... Un vin intéressant en tout cas, parce qu'il me pose question sans apporter de réponse définitive, si je continue ce petit jeu, la bouteille va y passer, et c'est bon signe. Grosse acidité, mais bonne buvabilité: au final, il a plutôt réussi son coup, le gars Ganevat.

J'en suis là de mes interrogations, lorsque mon regard est attiré par une mention, en minuscules caractères sur l'étiquette... Sur le côté droit, c'est le classique "contient des sulfites"... mais ces pattes de mouche, là, en bas au milieu? Je chausse mes besicles de quadragénaire, et découvre, amusé, le discret coup de provoc du sieur Ganevat: "Interdit aux cons"... Ca me fait sourire, mais une soudaine inquiétude me glace: et si j'en étais un, incapable de comprendre ce vin? Je me remonte aussi sec le moral en me disant que les cons, c'est peut-être ceux qui ne se posent pas de questions, et je m'en ressert une petite lichette, de l'interdit aux cons.

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8 avril 2010

C'est la gloire...

C'est la gloire, la consécration! J'ai reçu cette semaine via Crazy Yellow un courriel d'un producteur. Qui se proposait de me faire parvenir gracieusement une bouteille d'un de ses vins, pour me permettre de le goûter, afin que je donne mon avis... Ferais-je déjà partie de "ceux qui comptent" dans la blogosphère picrato-jurassienne?  C'est mon but dans la vie, l'objectif est atteint, je peux fermer Crazy Yellow.

Que les quelques rares pékins (et pékines) qui commencent peut-être à prendre l'habitude de me lire se rassurent: j'déconne... J'ai refusé la proposition, en remerciant poliment. Les vins dont je parle ici, je les paye. Ils viennent de chez le vigneron, ou de chez le caviste, parfois du supermarché du coin (pas d'exclusive sur Crazy Yellow). Je suis juste un amateur. vlcsnap_87511Pas le "grand amateur", comme on aime à dire dans le milieu du vin, celui qui possède une cave prestigieuse, la science du vin, le jugement sûr et le commentaire prolixe. Selon le dictionnaire de l'Académie, l'amateur est, notamment, celui ou celle qui manifeste un goût de prédilection pour quelque chose... Et puis l'amateur c'est aussi le non-professionnel, le footballeur du dimanche, le pianiste qui pianote.

Ca me va comme définition, je suis un individu qui aime le vin en général, et celui du Jura en particulier. j'ai un métier qui n'a rien à voir avec le vin, une connexion internet et l'envie de communiquer autour de l'objet de, comme dirait l'Académie, mon goût de prédilection. Crazy Yellow et tout ce qui va avec, dans le verre et derrière la cravate, c'est juste de la passion, du plaisir.

4 avril 2010

Etienne Thiébaud: sang neuf et vieux cépages

Faut quand même le faire... Démarrer tout seul à 20 ans à peine passés, tout juste sorti de formation, sans être du milieu viticole ni être né avec une cuiller en argent dans la bouche... Se monter de toute pièce son domaine en louant des parcelles de ci de là, parier sur des terroirs négligés, même pas en AOC, cultiver des cépages quasiment oubliés de tous, en sortir des vins sans concessions, pas de la bouteille passe-partout qu'on est sûr de vendre, mais des vins avec de la personnalité, la personnalité du sol, de la vigne et du vigneron.  Ben oui, faut quand même le faire... Etienne Thiébaud le fait, tous les jours depuis 3 ans.

DSCN9009On est aux Jardins de St Vincent à Arbois, chez le caviste passionné Stéphane Planche, Etienne est la guest-star de cette soirée consacrée à la découverte du Domaine des Cavarodes. Un domaine éparpillé façon puzzle, des vignes en location sur Arbois, Mouchard, Grozon, et Liesle. Liesle, c'est à une quinzaine de km à vol d'oiseau au nord d'Arbois, on est carrément passé dans le Doubs, hors de la zone AOC. Et à Liesle la tradition viticole est ancienne: au 19e siècle, la vigne était la principale culture, c'était à une période où le Doubs comptait près de 8000 hectares de vignes, la Haute Saône 13000, et le Jura de 16 000 à 19 000!  Difficile à imaginer aujourd'hui. De ces temps pré-phylloxériques il a subsisté à Liesle un vignoble résiduel, des parcelles cultivées dans un cadre familial pour une consommation personnelle, jusqu'à ce que débarque Etienne Thiébaud.

Mais goûtons voir si le vin est bon. On ouvre le bal avec un Arbois Poulsard des Gruyères 2008, issu d'une parcelle sur le secteur de Montmalin. C'est fait à la manière d'Etienne: vignes en conversion bio (non revendiquée... "pour moi c'est la manière de faire normale" dit le garçon), pas de levures ni d'enzymes, pas de filtration ni de collage, égrappage à l'ancienne à la planche à trou. Ce poulsard qui a bénéficié d'une fermentation semi-carbonique, se présente vêtu d'une robe claire un peu trouble. Le nez renarde, sans être pour autant désagréable, il y a du fruit. Un vin joliment acidulé, bien équilibré, aromatique, avec une légère amertume en finale. Un poulsard qui fait glouglou en tout cas.

Le second rouge est mon premier coup de coeur de la soirée. Une belle robe claire, mais nettement plus colorée que le poulsard, un très joli nez en finesse, qui pinote, sur les fruits rouges avec un côté sauvage qui lui va bien... Vivacité en bouche, toute en légèreté, tannins fins, finale acidulée d'une belle fraîcheur, sans perception tannique, que du plaisir. Vu le pedigree, on aurait pu craindre du rustique, eh bien non, c'est élégant, ça coule tout seul et ça fait sacrément du bien là où ça passe. Vin de Pays de Franche Comté rouge 2008, issu de la côte calcaire de Liesle. Un dictionnaire des cépages à lui tout seul:  un tiers de pinot noir, un tiers de trousseau, du pinot meunier, du gamay, du poulsard, du gueuche noir, de l'argant, du portugais bleu, de l'enfariné, et du mézy (ou meslier noir)... Le tout vinifié sans chercher à trop extraire, pour éviter justement de tomber dans le rustique, et élevé 10 mois en vieilles pièces.

lieslerolegbrLes raisins proviennent de 5 ou 6 petites parcelles éparpillés le long de la côte,  survivantes de l'ancien vignoble de Liesle, des vignes complantées, de 50 à 100 ans. Ces îlots de cépages oubliés suscitent l'intérêt des scientifiques, ceux de l'INRA de Montpellier ont fait le déplacement jusqu'à Liesle pour récupérer des échantillons qui ont rejoint la collection de vignes, unique au monde, du domaine de Vassal. En 1897, le vigneron et ampélographe salinois Charles Rouget, dans "Les vignobles du Jura et le la Franche Comté", recensait 40 cépages cultivés dans la région. Etienne Thiébaut raconte qu'après le phylloxéra, chaque village avait son maître greffeur, qui utilisait son propre choix de cépages. C'est donc l'assortiment de cépages d'un ancien maître greffeur de Liesle que nous avons dans nos verres ce soir là, vinifié par un jeune de 25 ans, dreadlocks en bataille. Chouette, non?  Et si en plus le vin est bon, que demande le peuple? Coup de coeur donc sur ce rouge, que j'avais déjà goûté une fois, peut-être sur un autre millésime, en tout cas en passant complètement à côté. En revenant dessus plus tard dans la soirée, sortent des arômes d'épices, de cannelle, et comme l'idée qu'il vieillira bien ce petit vin de Liesle...

Mais voici venue l'heure des blancs, avec le pendant du précédent: Vin de Pays de Franche Comté blanc 2008, très majoritairement chardonnay, mais complanté avec quelques pieds de savagnin, de savagnin rose ( le klevener de Heiligenstein des alsaciens), et de sauvignonasse. DSCN9004Non, la sauvignonasse n'est pas une vinasse à base de sauvignon, c'est, là aussi, un respectable cépage ancien du Jura, également appelé cinquien, parce que son premier raisin est opposé à la cinquième feuille. Un vin à la robe peu colorée, des notes de levure qui s'ouvrent rapidement sur un nez citronné. En bouche, le vin est tendu, vif, avec de la minéralité et un chouia de pamplemousse, la finale est plus suave. J'aime bien, mais c'est quand même un vin très droit, qui ne plaira pas à tout le monde.

Arrive derrière le Vin de Pays de Franche Comté 2009. Peu de coloration là aussi dans la robe, encore cette note de levure au nez, puis la poire, le jus de raisin frais. Une légère pointe de gaz en attaque, le vin est plus rond en bouche que son grand frère, plus souple, mais tout est relatif car l'acidité est bien présente dans tous les vins goûtés dans la soirée. En tout cas il y a plus de richesse, la structure acide est en partie camouflée par le gras et l'alcool. Encore jeune, à attendre, et pour cause: il est encore en cours d'élevage, l'échantillon a été tiré sur pièce.

La bouteille suivante nous ramène dans l'AOC... Un Arbois chardonnay 2008 avec un petit côté épicé au nez, des fruits jaunes, une pointe presque vanillée. C'est concentré, rond, gras pour 2008, mais la vivacité revient derrière et accompagne la longueur en bouche. Un beau potentiel d'après cet échantillon tiré d'une des pièces actuellement en cours d'élevage, et qui ne préjuge pas de l'assemblage final.

Et tout ceci nous amène au savagnin: Au premier nez, une note grillée qui disparaît vite, de la minéralité et du fruit, plutôt exotique, le fruit... Belle attaque souple mais acidulée, très aromatique en bouche, sur les agrumes, une acidité très fine, un vin concentré, puissant, encore bien vif, construit sur une structure acide-amère qui finit sur le pamplemousse. J'aime beaucoup cet Côtes du Jura savagnin 2008, d'une parcelle sur Grozon, encore farouche, mais qui se livrera superbement dans quelques années. Un savagnin ouillé avec les épaules d'un savagnin sous voile. C'est mon autre coup de coeur de la soirée. Encore en fût pour l'instant, la mise est prévue cette année.

L'Arbois savagnin pressé 2007 (2e mise) provenant de vignes à Mesnay, est un joli vin aussi, avec sa robe assez claire, son côté pomme verte, une trace oxydative malgré l'ouillage, une grosse structure acide et une finale épiçée... Mais le précédent, en ce qui me concerne, lui a volé la vedette.

Pas de bling-bling chez Etienne Thiébaut, ni dans sa manière d'être, ni dans son travail, ni dans ses vins, on en est à mille lieues... DSCN9003Le "ptit jeune" n'a pas choisi la voie de la facilité, il trace son chemin avec sincérité et simplicité, à l'écoute de ses vignes, proche de la nature et bien loin de l'oenochimie. Il en tire des vins épurés, certains ne les trouveront pas faciles d'approche, mais ce n'est pas le but. Des vins d'une belle richesse, qui reflètent le terroir et le vigneron, et qui font plaisir à boire. Une démarche à suivre et à encourager, qui pourrait le mener loin, l'Etienne...

Comme de coutume, nous clôturons avec le copieux mâchon du taulier et on finit tranquillement en cassant la croûte, tout en papotant et en attaquant quelques flacons de derrière les fagots du sieur Planche, à croire que déguster ça donne soif. Y'avait du bon aussi dans ces flacons surnuméraires, mais là n'est pas le propos de ce blog.

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